"Prix Handi-Livres 2012
Les historiens ou théologiens connaissent du roi Salomon sa dimension historique, biblique ou coranique. Pourtant, il en existe une autre, qui n’emprunte que très peu aux précédentes : c’est le Salomon légendaire, sur lequel les documents recueillis dans les traditions orales lettrées ou populaires sont d’une inépuisable richesse. C’est un fait unique, semble-t-il, qu’un personnage des textes sacrés soit emporté dans la légende avec autant de liberté et de bonheur par la tradition orale de tant de peuples.
Se tissant sur ces bases, déployant les indices laissés en une phrase ou un mot, la fantaisie des conteurs populaires, mais aussi et d’abord la rêverie des rabbins antiques, savants exégètes du Talmud, des docteurs interprétant le Coran, des maîtres mystiques Soufis, ou des prêtres d’Éthiopie, tous se sont donné le droit de développer, ciseler, colorer, enluminer, élargir, amplifier, bref exagérer les détails jusqu’au baroque, voire au délire.
«.. Je conte oralement cette histoire depuis 1986 et continue de le faire. Beaucoup d’aventures sont donc « mises en bouche » et portent, bien au delà du style, mon éclairage et ma sensibilité. C’est en ce lieu de liberté que le conteur se sent auteur de sa propre version. Cependant je me fonde sur les traditions - ou leur esprit - pour les détails de la plupart des récits et me sens assez fidèle pour citer mes sources. Là où je fus infidèle concerne ce qui touche la compréhension de la justice, que je ne pouvais laisser dans le talion, de même dans mon choix d’histoires : je dois avouer que j’ai laissé systématiquement de côté toutes les histoires où Salomon était dans le jihad, même en ce qui concerne la lutte contre les génies. J’ai donc délibérément choisi celles qui étaient cohérentes avec la paix dont il porte le nom, à la fois pour être fidèle à mes valeurs mais aussi pour la cohérence de l’ensemble, du tressage de toutes les histoires.
J’ai dû faire bien d’autres choix, bien des coupes franches : le corpus complet recensé de ces histoires me permet de conter durant huit heures et je n’ai fait qu’effleurer la tradition Éthiopienne, par exemple, qui est une mine sans fond… Je crois que le sujet est inépuisable et éternel...» Catherine Zarcate"